Challenge UPro-G : La Spécialité du Bas, une bonneterie des années 1930-1945
L’histoire familiale racontait les soldats allemands qui venaient acheter des bas et une alerte passée serrés les uns contre les autres dans un abri. Le jour où j’ai trouvé un bail de « sous-location » usé et déchiré, j’ai décidé de tirer ce fil et de chercher des informations sur ce magasin.
- La gérante : ma grand-mère Berthe
Berthe Aimée Paule Raymonde COMBES, née le 31 mai 1903 à Lyon 3ème, descend d’une lignée de commerçants. Le plus ancien connu est son arrière-grand-père Jean-Baptiste GOUX (1770-1840) marchand épinglier en Haute-Saône. Chaque génération compte ensuite son marchand bimbelotier, commissionnaire en marchandises, marchand forain… Jusqu’à ses parents, séparés, et son frère ainé Henri, qui possèdent chacun un ou plutôt des commerces successifs, émaillés de faillites et de rebonds, tous dans le textile, à Paris, Cannes, Marseille, Lyon et Genève (ci-contre le magasin de son père Abel à Genève en 1933).
2. Le magasin
Sans surprise donc, un mois après son mariage, Berthe ouvre son propre commerce « La Spécialité du Bas » au 19 quai Arloing à Vaise (Lyon 5ème). Nous sommes en 1931, l’immatriculation et tous les actes se font avec l’accord de son mari Régis Bernard, originaire de Saint-Sauveur-en-Rue dans la Loire, où il est né le 19 mai 1904.
Seul le fonds de commerce leur appartient, les co-propriétaires de l’immeuble de quatre étages avec cour intérieure habitent le Jura et l’Isère. Le bail nous apprend que Berthe et Régis louent « un local sis au rez-de-chaussée dudit immeuble, composé de trois pièces, magasin, arrière-magasin et cuisine » et « un local d’une pièce au 1er étage de la petite maison sur cour ».
Berthe va diriger ce commerce pendant 14 ans, tout en mettant au monde et en élevant cinq enfants.
3. La guerre
Le matin du 26 mai 1944, sous un beau soleil de printemps, les bombardiers américains surviennent. Leur objectif est de détruire les voies ferrées avant le débarquement en Normandie, afin d’empêcher les Allemands d’acheminer des renforts. Malheureusement, les bombes larguées en haute altitude sont peu précises, de nombreux bâtiments civils sont également touchés.
Le commerce est proche de la gare de Vaise. Aucune victime dans la famille mais le magasin est sinistré.
4. la vente du fonds
Berthe vend l’année suivante. L’acte de mutation précise que « les livres de comptabilité ont été détruits par éclats de bombes, lors du bombardement aérien du vingt-six mai dernier »
La famille part vivre à Caluire, banlieue nord de Lyon. Berthe ne reprend pas de commerce. Elle devient assistante maternelle et élèvent ses enfants, son petit-neveu et les nombreux petits qui lui sont confiés pendant sa longue carrière.
Sources: AD Rhône: matrice cadastrale; registre formation des commerces; actes de mutations des fonds de commerce; baux; photothèque Bibliothèque municipale de Lyon: https://numelyo.bm-lyon.fr/BML:BML_01ICO001014cc993b533b03