Les octogénaires sont rares parmi nos ancêtres nés avant le XXe siècle. Cet âge vénérable est considéré comme un maximum par les logiciels de généalogie comme Heredis. Au-delà rien d'impossible mais un message de contrôle de cohérence apparait.
Pour nos ancêtres, la première étape était bien sûr d’atteindre l’âge adulte. Puis une autre épreuve attendait les femmes en âge de procréer, une surmortalité par rapport aux hommes qui ne s'est inversée que récemment.
Cette espérance de vie réduite était liée non seulement à la maternité mais aussi à la double tâche des charges domestiques et professionnelles et au niveau socio-économique (voir article A. Perrenoud).
J’ai cherché les octogénaires de ma généalogie parmi mes ancêtres directes nées au XVIIIe et XIXe siècles. Ces femmes ont atteint l’âge adulte et eu au moins un enfant. Huit des 114 ancêtres pour lesquelles j'ai vérifié les actes de naissance et décès ont dépassé les quatre-vingts ans et deux sont devenues nonagénaires : 5/90 au XVIIIe et 5/24 au XIXe siècle.
Cinq d'entre elles ont vécu dans des lieux et milieux variés, issues de branches différentes et seules personnes très âgées dans leur famille proche. Elles ont eu entre trois et dix enfants.
Dans le Roannais, deux ancêtres membres d’une famille de paysans aisés atteignent un âge respectable.
Blanche Marcoux (1752-1843) épouse d’un vigneron de Bully avec lequel elle a sept enfants devient nonagénaire. Elle a pu tenir dans ses bras son arrière-petite-fille Michelle Lamure (1842-1925) cultivatrice propriétaire mère de huit enfants qui, elle, meurt à l’âge de quatre-vingt-deux ans. Les bienfaits de longues marches dans le calme de la région?
L’hérédité aurait une part plus réduite qu'on ne le pense dans notre espérance de vie mais une branche de ma famille se détache tout de même, celle de ma grand-mère paternelle, composée de paysans et journaliers carriers pauvres qui vivaient le long de la boucle du Rhône séparant l’Ain et l’Isère.
Marie Carraz (1749-1825), épouse d’un journalier de Saint-Maurice-de-Gourdans dans l’Ain, six enfants, est l’arrière-grand-mère de Louise Mitaine (1862-1950). Celle-ci vit à Vertrieu dans l’Isère puis à Lhuis dans l’Ain avec son mari chaufournier et a quatorze enfants. Certes elle souffre de rhumatismes invalidants à la fin de sa vie.
Mais toute sa famille affiche une longévité évidente. Les oncles et tantes de Louise vivent entre soixante-quinze et quatre-vingt-sept ans.
Certains de ses quatorze enfants disparaissent autour de la vingtaine victimes de la guerre et de la tuberculose. Mais deux dépassent soixante-dix ans et quatre deviennent octo- et nonagénaires dont ma grand-mère Marie-Louise Pirodon (1895-1990) morte à quatre-vingt-quatorze ans.
La série se poursuit : le fils aîné de Marie-Louise a disparu à quatre-vingt-neuf ans, sa fille aînée à quatre-vingt-douze, et ses deux plus jeunes enfants affichent une bonne santé du haut de leurs quatre-vingt-sept et quatre-vingt-cinq ans.
Sources : Paysans des Mauges, fin xviiie siècle. Archives départementales du Maine-et-Loire, 11Fi 437. Photographies personnelles
