Une branche de ma famille maternelle originaire du Roannais, très croyante et pratiquante, a compté plusieurs prêtres et religieuses, dont une jeune fille morte à seize ans pendant son noviciat.
Mon arrière-grand-mère Marie Georges (1867-1933) était institutrice, mariée à un facteur Louis Bernard (1863-1933). Elle descendait des familles Donjon à Cremeaux et Truchard à Souternon qui comptaient plusieurs prêtres : Antoine Marie Truchard (1738-1800) curé de Lissieu dans le Rhône pendant la Révolution, Claude Antoine Donjon (1839-1888) officiant à Maizilly. Plus près d’elle le cousin germain de son père, un autre Antoine Marie Truchard (1846-1915) était doyen d'une université catholique au Texas.
Marie fut institutrice pendant la « guerre scolaire » de la fin du XIXe siècle. Elle fut renvoyée de son poste de vacataire à l’école publique du village car elle déposait ses enfants à l’école de la Congrégation avant d’arriver au travail. Elle refusa toujours de les mettre à « la laïque » et les instruisit elle-même.
Dans cette atmosphère, plusieurs de ses fils partirent au séminaire mais ne devinrent pas prêtres. Mon grand-père notamment s'éloigna de ce destin, ce qui explique mon arrivée sur terre. Mais deux filles entrèrent dans les ordres : Cécile et Marie Bernard.
Cécile était la sixième des dix enfants du couple, née le 23 mars 1902 au bourg de Saint-Martin-la-Sauveté. Vers l'âge de quatorze ans elle partit chez les Religieuses de Saint-François d'Assises, des hospitalières de Saint-Sorlin dans le Rhône.
Cette congrégation créée en 1847 s’était installée à Saint-Sorlin en 1859 pour l’accueil des enfants démunis, orphelins ou des handicapés.
La communauté apparait dans le recensement de population de 1861: trente religieuses dont la fondatrice Louise Perret, trois employés et 118 pensionnaires dont on apprend qu’elles sont « reçues par charité », « idiotes », « sourdes-muettes », « aliénées non dangereuses ». Beaucoup d’enfants naturels également.
Dans les recensements suivants, ne sont mentionnés que les aumôniers, domestiques et employés hommes qui vivent hors de la congrégation. Pourtant les religieuses et orphelins sont encore là, retrouvés au fil des pages des registres de l’état civil. Ainsi cette petite fille abandonnée à Lyon et morte à neuf ans. Celles qui survivaient étaient formées à la couture et aux travaux des champs et placées dans des familles vers les douze ans.
En 1916 quand Cécile Bernard rejoint la communauté, la Congrégation n'a plus le droit d'enseigner et se concentre sur les soins aux indigents. Cécile devient Sœur Imelda. Elle meurt le 14 octobre 1918 à l’âge de seize ans sans que l’on en connaisse la cause.
Sources : Archives départementales de la Loire et du Rhône ; notice de la Bnf : Petites Sœurs de Jésus (Franciscaines de Saint-Sorlin)